Il est des signaux discrets en apparence mais puissants dans leur portée. Le moment politique que traverse notre pays nous oblige à les saluer avec lucidité.
Deux faits méritent d’être soulignés avec force : l’ouverture démocratique amorcée par la Radiodiffusion Télévision Sénégalaise (RTS) et la décision de justice rendue en faveur de la journaliste Aissatou Diop Fall, directrice du site Public.sn, dans le différend qui l’opposait au ministre de la Communication.
La RTS m’a récemment reçu dans le cadre d’une émission diffusée à grande écoute. Un geste banal en démocratie mais devenu rare au Sénégal où le service public médiatique s’est trop souvent illustré par le verrouillage de la parole critique et la marginalisation systématique des voix discordantes.
L’invitation que j’y ai reçue n’est pas un privilège. C’est le rétablissement d’un droit fondamental, celui pour chaque citoyen d’accéder à une information équilibrée et pour chaque acteur politique de pouvoir s’exprimer devant le peuple.
Je tiens à féliciter la journaliste Ndeye Arame Touré pour son professionnalisme rigoureux et le Directeur général Pape Alé Niang pour l’impulsion qu’il donne à cette institution dans un sens de justice médiatique. Leur action contribue à amorcer une rupture salutaire avec des pratiques d’exclusion qui ont fragilisé, pendant trop longtemps, la légitimité du service public de l’information.
Cette ouverture, si elle se confirme, participe à la refondation républicaine que tant de Sénégalais appellent de leurs vœux.
Dans le même esprit, je salue avec respect la décision rendue par la cour suprême en faveur d’Aissatou Diop Fall et de son média Public.sn.
Au-delà de son aspect juridique ce jugement représente un acte politique majeur au sens noble du terme. Il rappelle que la justice peut et doit être un rempart contre l’abus d’autorité. En tranchant en faveur d’un organe de presse attaqué par un ministre, la justice sénégalaise vient d’envoyer un signal fort à tous ceux qui confondent pouvoir politique et pouvoir absolu.
Cette double respiration n’est pas un aboutissement. C’est un point de départ.
La liberté d’expression ne saurait être un moment. Elle doit être un principe et les principes, en République, ne doivent jamais dépendre de la seule volonté des hommes. Ils doivent être garantis par les institutions.
Féliciter ne signifie pas relâcher la vigilance, bien au contraire. C’est parce que nous avons salué ces avancées que nous serons plus exigeants sur leur pérennité. Le Sénégal a besoin de médias debout, de tribunaux justes et de citoyens éclairés.
C’est ensemble, dans la lucidité et le respect des droits que nous pourrons bâtir cette démocratie solide que nous méritons.
Thierno Bocoum
Président d’AGIR-LES LEADERS
Lire l'article original ici.