3:20 pm - 20 juin, 2025

La migration des enfants en Afrique de l’Ouest est un phénomène complexe, influencé par des facteurs historiques, économiques et sociaux. Le Professeur Aly Tandian, Directeur du GERM-Université Gaston Berger de Saint-Louis et président de l’Observatoire sénégalais des migrations, apporte des éclairages suite à une étude menée dans plusieurs pays africains avec le soutien de la Coopération suisse.

La prévalence des migrations d’enfants en Afrique de l’Ouest est élevée, et les conditions de ces déplacements sont souvent précaires. La quantification précise est difficile en raison de la prédominance du secteur informel et du manque de données sur la mobilité. Les migrants sont majoritairement des adolescents de 15 à 24 ans, mais on compte aussi des enfants plus jeunes, parfois non accompagnés. Les filles représentent une part importante de ces enfants migrants et sont exposées à des risques spécifiques tels que les mariages précoces et l’exploitation sexuelle. Ces enfants travaillent dans divers secteurs : le travail domestique, l’extraction minière (Guinée, Burkina Faso, Sénégal) et l’agriculture saisonnière (Côte d’Ivoire, Ghana).

Plusieurs facteurs expliquent la présence des enfants dans les migrations de travail. La pauvreté et les crises économiques sont souvent citées. Selon le PNUD, plus de 100 millions de personnes vivaient dans la pauvreté en Afrique de l’Ouest en 2002. Cette situation pousse de nombreux enfants à migrer pour soutenir financièrement leur famille. À cela s’ajoutent des facteurs culturels détournés, tels que le « confiage » (placement d’enfants chez des parents pour éducation) et le « trokoshi » au Ghana et au Togo (location de filles à des prêtres vaudous), une pratique qui facilite la traite des enfants. Dans le Sahel central (Burkina Faso, Niger, Mali), plus d’un million d’enfants sont déplacés.

Au Bénin, au Togo et au Nigeria, des milliers d’enfants sont exploités et privés d’accès à la protection et à l’éducation. Les filles sont particulièrement touchées par les interruptions scolaires. Le manque de données harmonisées et l’insuffisance des cadres juridiques nationaux pour criminaliser le travail des enfants dans l’informel constituent des défis majeurs. La CEDEAO, malgré sa promotion de la libre circulation, ne dispose pas de protocoles spécifiques pour les enfants migrants, ce qui crée des lacunes dans leur protection.

La solution réside dans une approche combinant la répression de la traite et des solutions durables, comme la réintégration scolaire et les formations adaptées, qui semblent efficaces. Le Professeur Tandian préconise une protection holistique et des initiatives régionales. Il suggère des investissements dans l’emploi des jeunes pour lutter contre la pauvreté structurelle, une adaptation des cadres culturels (transformer des pratiques comme le « confiage » en dispositifs protecteurs) et un renforcement des systèmes de données pour des interventions plus ciblées. « La migration des enfants restera, mais seule une approche coordonnée peut en faire une opportunité plutôt qu’une menace », conclut-il, selon Sud Quotidien.

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