4:01 am - 24 octobre, 2025

Au printemps dernier, de longues files d’attente s’étiraient sur la rue Cartier, visibles jusque sur la rue Fraser, dans le quartier Montcalm. La raison qui poussait de si nombreux curieux à patienter plus d’une heure pour de la viande, des légumes et du pain? L’ouverture du comptoir appelé Papa Sandwich.

Apparemment, Québec a faim de sandwichs. Et le marché répond à la demande. Qu’est-ce qui explique cette fascination récente des consommateurs et des restaurateurs?

1) Un marché en rattrapage

«Québec est en retard sur le sandwich!» lance Jonathan Marcoux, copropriétaire de Franky Johnny, qui compte deux adresses, dans Saint-Sauveur et dans Limoilou.

«À Montréal et dans plusieurs grandes villes, chaque quartier intéressant a sa sandwicherie, parfois plus d’une, ajoute-t-il. À Québec, il y a toujours eu des boulangeries qui faisaient des sandwichs, en plus de Fastoche et Subway, mais rien de plus. Alors, on est en rattrapage.»

«Ce qui m’étonne, c’est qu’on n’ait pas eu cette fièvre-là plus tôt»

—  Jonathan Marcoux, copropriétaire de Franky Johnny

L’homme d’affaires observe aussi un plus grand sentiment d’appartenance des résidents et des clients envers les entreprises de leurs quartiers. Cette affection pour l’hyperlocal insuffle un nouvel élan aux petits commerces de proximité, dont les comptoirs à sandwichs, d’après lui.

2) L’effet viral des réseaux sociaux

Chez Papa Sandwich, la folie initiale s’est heureusement calmée depuis le printemps. Fini d’avoir à attendre une heure pour un «Hot Honey Baby» au poulet croustillant et miel épicé. Les affaires continuent de très bien rouler, cela dit.

Le cofondateur Nathan «Nate» Todd remarque lui aussi que les sandwicheries fines se faisaient plus rares à Québec. Il ajoute cependant que le regain de popularité pour cette création culinaire attribuée au comte de Sandwich, au 18e siècle, a été fortement moussé par les réseaux sociaux.

«À Montréal, il y a des sandwich shops à tous les coins de rue. Alors, on était dû à Québec, estime-t-il. Par contre, c’était déjà immensément populaire en ligne, alors on n’avait pas besoin d’introduire un nouveau produit niché sur le marché. C’est facile à rendre viral, car ça pogne. C’est d’ailleurs ce qui m’a donné l’idée initiale d’ouvrir mon resto.»

Si Nate Todd s’y connaît en la matière, c’est parce que ses vidéos de cuisine de sandwichs gourmands, fondants et dégoulinants comptent parmi les plus populaires auprès de ses 240 000 abonnés sur TikTok et Instagram. «Le potentiel viral était là, et ç’a montré le potentiel d’affaires à plein de monde», dit celui qui vient de publier le livre de recettes Sandwichs: Trop gourmand? Jamais.

3) Une séquelle de la pandémie

Si Ben Lacourse a choisi de quitter son poste de chef au resto Le Cendrillon (Limoilou) pour bientôt ouvrir sa sandwicherie baptisée Baloney, c’est parce que l’idée le séduit depuis une douzaine d’années. Qui plus est, les efforts des restaurateurs devant les contraintes imposées pendant la pandémie de COVID-19 lui ont montré une façon différente d’envisager son industrie.

«Cette espèce de buzz est apparue avec la pandémie. Les restaurateurs ont dû se revirer de bord sur un 10 cennes pendant trois, quatre ans, raconte-t-il. Alors, beaucoup d’entre eux, même des haut de gamme, ont fait du take-out de style diner et fast food. L’intérêt pour le sandwich a émergé de ça. Tellement que ça fait partie de la culture culinaire actuelle.»

Selon M. Lacourse, une sandwicherie de quartier peut être un porte-étendard communautaire que les gens du coin doivent s’approprier, même au sein d’une industrie aussi compétitive que la restauration. «Il y a de la place pour tout le monde et la clientèle est là pour répondre à l’appel. Alors, c’est le bon moment!» résume le chef surnommé Bear, dont le projet est en sociofinancement pour quelques heures encore.

4) La quête du mieux-être

Copropriétaire du Groupe Le Subtil, Mélanie Boivin voit derrière cette effervescence une tendance plus grande encore. «Cet intérêt s’inscrit dans une tendance mondiale vers la restauration rapide axée sur le mieux-être», estime-t-elle.

«L’envie de meilleures habitudes de vie amène les consommateurs à chercher des repas santé, rapides et frais, avec une traçabilité des ingrédients. La sandwicherie fine se colle vraiment à ça.»

—  Mélanie Boivin, copropriétaire du Groupe Le Subtil

En 1986, les fondateurs André et Paul Boivin lançaient le premier resto Subtil. C’était la même année que l’ouverture du premier Subway au Canada, à St. John’s (capitale de Terre-Neuve-et-Labrador). Depuis, tous les indicateurs restent au vert pour les sœurs propriétaires Mélanie et Laurie. À preuve, elles planifient d’ouvrir un nouveau resto par année pendant la prochaine décennie, en plus des quatre actuels à Québec et à Lévis.

«En ce début de nouvelle ère, [la sandwicherie] répond bien aux besoins pour un fast food santé. Et les artisans locaux de proximité sont bien placés pour le faire», indique Mme Boivin.

Le mot de la fin…

Ultimement, le mot de la fin revient à Jonathan Marcoux, de Franky Johnny, pour — peut-être — expliquer le plus simplement la croissance du marché des sandwichs à Québec: «Au fond, qui ne veut pas de beaux lunchs sur le pouce qui ne coûtent pas 50 $ pour dîner?»

Ressentez-vous cet intérêt pour le sandwich? Qu’est-ce qui explique la popularité des sandwicheries, selon vous? Partagez vos impressions dans la section des commentaires au bas de cet article.

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Le Soleil est un quotidien francophone de Québec. Fondé le 28 décembre 1896, il est publié en format compact depuis avril 2006.

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