Alors que le gouvernement américain vient d’augmenter les droits de douane cumulés à un taux de 27,3 % et que ce taux devrait atteindre 34,94 % dans quelques semaines, Mark Carney a annoncé des investissements dans l’industrie forestière mardi.
Le premier ministre a présenté des garanties de prêt de 700 millions de dollars conçues pour donner du souffle aux entreprises forestières, alors que neuf milliards de dollars sont gelés à la frontière à cause du conflit du bois d’œuvre.
De plus, le gouvernement ajoute un investissement de 500 millions de dollars pour diversifier les produits et les marchés du bois d’œuvre, mais c’est l’annonce sur la création de Maisons Canada qui retient l’attention des acteurs de l’industrie forestière.
Un programme de 35 milliards
Selon les informations présentées sur le site du Parti libéral, le gouvernement canadien financerait, à travers Maisons Canada, les constructeurs de maisons préfabriquées à la hauteur de 25 milliards de dollars, en plus d’offrir 10 milliards de dollars en financement et en capital à faible coût aux constructeurs de logements abordables.
«C’est l’annonce qui a la portée la plus stratégique faite par Mark Carney», estime Frédéric Verreault, le vice-président aux affaires corporatives chez Chantiers Chibougamau.
Lors d’une grosse année de construction en Amérique du Nord, il se bâtit entre 1,8 et 2 millions de maisons. «En construisant 500 000 maisons par année, on touche au nerf de la guerre, dit-il, parce que ça représente une énorme quantité de bois».
Éric Rousseau, le directeur général de la Coopérative forestière Ferland-Boilleau, abonde dans le même sens. «La construction d’une maison représente au minimum 10 000 pieds mesure planche (pmp: une mesure qui équivaut à une planche de 12 pouces sur 12 pouces sur 1 pouce d’épaisseur) de bois, alors pour construire 500 000 maisons, ça prendra au moins cinq milliards de pmp de bois d’œuvre», lance-t-il, heureux de l’annonce.
Ce volume de bois n’équivaut pas à la quantité de bois exporté aux États-Unis, mais il représente tout de même un gros volume qui pourrait faire une différence dans le marché.
«Le conflit du bois d’œuvre dure depuis 43 ans, alors il faut s’y faire et faire autre chose que du deux par quatre voué à l’exportation», estime Louis Dupuis, consultant et économiste spécialisé en foresterie. On doit favoriser l’utilisation du bois au Canada».
Selon ce dernier, une utilisation accrue du bois localement créera une pression sur le marché, ce qui fera grimper les prix sur le marché nord-américain tout en réduisant notre dépendance à l’exportation.

«Le gouvernement canadien doit maintenant définir clairement le ou les programmes en question afin que les industriels puissent avoir une vision des investissements qu’ils devront faire pour répondre aux besoins du ou des programmes», ajoute l’économiste.
Un premier ministre en soutien
Frédéric Verreault se réjouit de voir que c’est le premier ministre lui-même qui a fait l’annonce de soutien à l’industrie forestière.
«C’est un immense changement parce que le bois d’œuvre ne semblait pas une priorité du gouvernement au cours des 15 dernières années, dit-il. Mardi, c’est Mark Carney qui a fait l’annonce avec son premier trio, ce qui démontre l’importance de la filière forestière au pays ».
À court terme, Chantiers Chibougamau espère percer le marché de Vancouver. «Aujourd’hui, le marché de la construction de Vancouver utilise des poutrelles équivalentes aux nôtres faites aux États-Unis, note le VP de l’entreprise. En offrant de meilleures conditions, c’est un marché que l’on souhaite développer».
Pour construire 500 000 maisons par année, la construction modulaire sera aussi appelée à jouer un plus grand rôle. «C’est stimulant pour nous, note Frédéric Verreault. On va retourner à la table à dessin pour augmenter notre capacité de production.»
Éric Rousseau croit lui aussi qu’il faudra miser sur le modulaire pour construire autant de maisons, car il n’y a pas assez de main-d’œuvre dans l’industrie de la construction. «Il faudra augmenter la capacité de production, dit-il, souhaitant faire partie de la solution. Les usines de sciage pourraient former des consortiums pour fabriquer des maisons avec leur propre bois.»
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