Madame la Ministre,
Permettez-moi tout d’abord de vous adresser mes plus sincères félicitations pour votre nomination à la tête du ministère de la Justice, un département régalien, essentiel à la vitalité de notre démocratie et à la stabilité de notre République.
Votre première décision publique, celle de visiter la prison de Rebeuss dès les débuts de votre magistère, a profondément marqué les esprits. Ce n’est pas un geste anodin, mais un acte fort, un signal clair que vous entendez exercer vos fonctions au plus près de la réalité, dans la vérité des faits et non dans le confort des bureaux climatisés.
Cette démarche traduit une conscience aiguë des défis qui vous attendent : ceux liés à la réforme du système pénitentiaire, à la préservation des droits humains et à la dignité des personnes détenues.
Vous prenez les rênes d’un ministère complexe, sensible, et parfois exposé à des pressions multiples politiques, sociales, voire médiatiques. Mais vous le faites avec une sérénité et une intelligence qui rappellent les grandes figures féminines qui vous ont précédée.
Je pense ici à Madame Mame Madior Boye, dont l’autorité tranquille et la compétence juridique ont marqué une génération entière de juristes.
Je pense également à Madame Aminata Touré, qui a su faire de la Justice un levier de réforme et de rigueur républicaine, dans des contextes parfois houleux.
Et enfin, à Madame Aïssata TALL SALL, qui a su incarner, par sa parole libre et son audace intellectuelle, une justice ouverte, sensible aux réalités du peuple.
Votre présence aujourd’hui à ce poste s’inscrit dans cette lignée. Vous en êtes l’héritière, mais aussi la promesse d’un renouveau : celle d’une justice moderne, humaine et respectueuse des équilibres institutionnels.
Vous succédez à un homme d’une rare probité, le magistrat Ousmane Diagne, dont l’attitude courageuse restera longtemps gravée dans la mémoire politique de notre pays.
Pour la première fois, un ministre de la Justice en exercice a eu la lucidité et le courage de défier les diktats de son propre camp, de refuser la soumission à la politique partisane, et de défendre la séparation des pouvoirs avec une intransigeance admirable.
Il a résisté aux tentatives d’instrumentalisation de la Justice, affirmant avec dignité que le Garde des Sceaux n’est pas un bras armé politique, mais un gardien des lois et de la conscience républicaine.
Ce courage, rare et précieux, constitue un exemple pour toute une génération de serviteurs de l’État.
Je forme le vœu sincère que vous poursuiviez dans cette voie, en consolidant l’indépendance de la Justice et en la rendant plus proche des citoyens.
Parmis vos défis urgents se trouvent la prison de Rebeuss et la question de la dignité.
Votre visite à Rebeuss n’est pas un simple protocole. C’est une immersion dans le cœur d’un problème structurel.
Cette prison, construite pour environ 800 détenus, en abrite aujourd’hui entre 3 000 et 4 000. Les conditions de détention y sont indignes : surpopulation, insalubrité, accès limité aux soins, une cohabitation illégale (Packétage) et aux toilettes, détresse psychologique et lenteurs judiciaires énormes.
Ces réalités plus d’autres beaucoup plus complexes que je ne pourrais pas citer, vous
avez vues certaines de vos propres yeux. Et cela vous donne une légitimité pour engager une réforme en profondeur du système pénitentiaire sénégalais.
Il ne s’agit pas seulement d’améliorer les infrastructures, mais aussi de repenser la finalité même de la détention : punir oui, mais aussi réinsérer, éduquer et réhabiliter pas créer plus de délinquants et parfois de criminels.
Une justice moderne ne se mesure pas au nombre de condamnations, mais à sa capacité à offrir une seconde chance, à protéger sans humilier, et à corriger sans détruire.
Un message d’espoir et de responsabilité en tant que jeune citoyen sénégalais, je veux vous dire que votre nomination suscite beaucoup d’espoir.
Nous sommes nombreux à attendre une justice équitable, indépendante et transparente, à la hauteur de notre ambition nationale.
Une justice qui ne soit pas l’instrument des puissants, mais le bouclier des faibles.
Une justice qui fasse de la vérité une valeur cardinale, et non une variable d’ajustement politique.
Vous avez l’opportunité d’écrire une nouvelle page dans l’histoire judiciaire du Sénégal : celle d’une justice apaisée, réformatrice et réconciliatrice.
Madame la Ministre, votre mission est immense, mais votre premier pas est prometteur.
Vous avez montré de la lucidité, du courage et une écoute rare.
Poursuivez sur cette voie, avec la rigueur de vos devancières et la droiture de votre prédécesseur.
Le peuple sénégalais et particulièrement sa jeunesse vous observe, mais surtout, il espère.
Que votre magistère soit celui du redressement moral, du respect du droit et de la dignité humaine.
Et que la Justice, sous votre impulsion, redevienne ce qu’elle doit être : le pilier sacré de la République et le miroir de notre conscience collective et non une justice qui cède aux pressions populistes.
Avec mon profond respect républicain.
Président Mr Bougar DIOUF
Union des Panafricanistes Sénégalais – UPS
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