Lorsqu’Astrid Carlson a enfin la chance de regrouper quatre Stradivarius (deux violons, un alto et un violoncelle) et de réaliser le fantasme de son père, l’héritière va sauter sur l’occasion. À tout prix et au grand dam de son frère qui tente de maintenir à flot la compagnie familiale.
Encore faut-il réunir les virtuoses pour interpréter une partition inédite, composée il y a plus de 25 ans par Charlie Beaumont (Frédéric Pierrot), à la demande du mécène.
Le scénario de Magne (Les parfums) propose évidemment des interprètes aux antipodes: un ex-couple qui s’ignore, un jeune premier imbuvable et une ingénue influenceuse…
Sans surprise, le quatuor, rassemblé par Astrid dans le luxueux manoir familial, s’avère incapable de s’accorder. Cette mise en place, passage obligé, met la table à l’arrivée (en sauveur, mais à contrecœur) de Charlie Beaumont.
Comme il le dit, réunir de bons musiciens, ça n’a jamais fait un bon quatuor, sinon ça se saurait. Sans compter que ses doutes (existentiels) le paralysent…
Les musiciens prend véritablement son envol à partir de ce moment. Parce que le long métrage s’attarde aux interactions entre chacun des humains derrière la façade de l’artiste. Sous l’œil attentif et inquiet d’Astrid (l’actrice et réalisatrice Valérie Donzelli, tout en nuances), qui doit composer avec la pression fraternelle et la possibilité très réelle que l’enregistrement vire à la catastrophe.

La production a pris l’heureuse décision de miser sur de véritables musiciens. Qui sont aussi acteurs: Mathieu Spinosi (George Massaro, premier violon), Emma Ravier (Apolline de Castre, alto), Marie Vialle (Lise Carvalho, violoncelle), à l’exception de Daniel Garlitsky (Peter Nicolescu, deuxième violon).
Du classique à Nirvana
Les performances se révèlent ainsi plus incarnées et le geste, plus juste. Sans compter que la musique de Grégoire Hetzel (compositeur attitré d’Arnaud Desplechin et de Mathieu Amalric) s’avère un personnage à part entière.
Sans les acteurs pour la défendre, toutefois, elle ressemblerait à un écrin vide. À cet égard, le passage le plus authentique demeure une surprenante interprétation de Where Did You Sleep Last Night (une chanson traditionnelle popularisée par Lead Belly, puis par Nirvana).
La réalisation discrète mais attentive de Magne permet d’ailleurs au spectateur de se concentrer sur le jeu et les échanges.
À vol d’oiseau
Malgré quelques surprises, la linéarité et la prévisibilité du scénario s’avère la principale faiblesse d’un film qui se distingue autrement par sa fraîcheur, la qualité de ses dialogues et certains moments particulièrement inspirants.
Dont celui où Beaumont explique au quatuor qu’il doit jouer comme une volée d’étourneaux, en se laissant guider par le mouvement (et leur instinct) pour que jaillisse la musique. Ce qu’on appelle aussi l’inspiration.
Les musiciens n’en manque pas. Sans les éclairs de génie qui font une grande œuvre (comme Tár de Todd Field, par exemple, dans un autre registre).
Mais les comédies intelligentes et humaines sont trop rares pour bouder son plaisir.
Les musiciens est présenté au cinéma.
Au générique
- Cote: 6,5/10
- Titre: Les musiciens
- Genre: Comédie
- Réalisation: Grégory Magne
- Distribution: Valérie Donzelli, Frédéric Pierrot
- Durée: 1 h 40
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