En juillet 2022, le pape François entreprend un pèlerinage pénitentiel à travers le Canada. D’Edmonton à Iqaluit, en passant par la Capitale nationale, le Saint-Père souhaite alors parcourir le vaste territoire canadien pour tenter de panser les plaies laissées par l’implication de l’Église dans les pensionnats, symboles de négligence et d’abus pour des milliers d’enfants autochtones.
Le souverain pontife marque l’histoire à Maskwacis, en Alberta, au tout début de sa visite de six jours en sol canadien.
Il exprime ses regrets et sa honte pour les abus commis par certains membres de l’Église catholique dans les pensionnats. Il s’excuse également pour les efforts de destruction culturelle et d’assimilation forcée qui ont gangrené ces institutions, à travers le pays.
«Je suis désolé. Je demande humblement pardon pour le mal commis par tant de chrétiens contre les peuples autochtones.»
—  Déclaration en espagnol du pape François lors de sa visite au Canada
Quelque 150 000 enfants autochtones ont été contraints de fréquenter les pensionnats pendant un siècle. On estime que 60 % des établissements étaient dirigés par l’Église catholique.
À Québec
De passage à Québec, quelques jours plus tard, le pape François réitère ses excuses.
À la Citadelle de Québec, en présence de dignitaires et de représentants des Premiers Peuples, le Saint-Père rappelle les conséquences des pensionnats. «Je pense surtout aux politiques d’assimilation et d’affranchissement, qui comprennent aussi le système des écoles résidentielles, qui ont détruit de nombreuses familles autochtones en compromettant leur langue, leur culture et leur vision du monde.»
«Diverses institutions catholiques locales y ont été impliquées; c’est pourquoi j’exprime honte et douleur et, avec les évêques de ce pays, je renouvelle ma demande de pardon pour le mal commis par de nombreux chrétiens contre les peuples autochtones», affirme alors le souverain pontife.
«Notre désir est de renouveler la relation entre l’Église et les peuples autochtones du Canada, une relation marquée à la fois par un amour qui a porté d’excellents fruits et, malheureusement, par des blessures que nous nous engageons à comprendre et à soigner», soutient le Saint-Père, qui a également profité de sa visite dans la région pour présider une messe sous le thème de la réconciliation à la basilique Sainte-Anne-de-Beaupré.
Des réactions mitigées
Le premier ministre canadien de l’époque, Justin Trudeau, salue d’emblée les excuses papales.
«C’est un point de départ, un premier pas», avait réagi le politicien, également présent à Québec.
Plusieurs représentants des peuples autochtones restent quant à eux dubitatifs face aux regrets exprimés par le pape François.
Le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, Ghislain Picard, souligne alors que les excuses ne seraient que «très significatives» dans la mesure où des gestes suivront pour les appuyer.

Certains critiquent également le souverain pontife pour n’avoir mis le blâme que sur les individus, plutôt que sur l’Église en elle-même.
«On ne parle pas seulement de quelques personnes mal intentionnées. Il s’agissait d’un effort commun pour retirer des enfants de leur famille et de leur culture, tout ça au nom du Christ tout puissant», avait souligné Murray Sinclair, président de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
Les survivants des pensionnats réclamaient depuis plusieurs années des excuses de la part de l’Église.
L’ancien chef national de l’Assemblée des Premières Nations, Phil Fontaine, s’était d’ailleurs rendu au Vatican, en 2009, pour rencontrer l’ancien pape Benoît XVI et lui demander de présenter des excuses en sol canadien. Benoît XVI n’avait alors pas obtempéré.
«Génocide»
La visite du pape François en territoire canadien s’est close par un arrêt à Iqaluit, où le pape François a, encore une fois, réitéré ses excuses.

Sur le vol de retour, questionné par un journaliste, le Saint-Père est allé jusqu’à convenir que les abus commis dans les pensionnats constituaient un «génocide».
«Enlever des enfants, changer la culture, leur mentalité, leurs traditions — changer une race, une culture entière (…) oui, j’utilise le mot génocide», avait-il indiqué par l’intermédiaire d’un interprète.
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