«J’ai toujours eu l’objectif de partir ma compagnie, mais sans savoir sous quelle forme», laisse tomber le producteur Neegan Sioui Trudel. Après de nombreuses années dans l’industrie créative, il apposera bientôt le logo de sa boîte de production autochtone, Oraquan Médias, sur les murs de son local de Wendake.
Sa petite équipe, composée d’une employée à temps plein, de lui-même et de quelques pigistes, y est installée depuis tout juste quelques mois, lors de la visite du Soleil. Plus qu’un bureau, l’espace se veut le symbole de l’atteinte de l’objectif que Neegan Sioui Trudel caresse depuis longtemps.
«Je suis ce qu’on pourrait appeler un électron libre», établit l’entrepreneur wendat.
Des installations muséales aux balados, en passant par des projets télévisuels et cinématographiques, la mission que s’est donnée le producteur semble n’entrer dans aucune case, tant elle est vaste. Sa compagnie, qu’il qualifie de «boîte créative numérique», produit divers projets, sur diverses plateformes pour des clients qui sont, «pour le moment», exclusivement autochtones.
Entrepreneur avant tout
Établi à Wendake, comme sa famille avant lui, Neegan Sioui Trudel rêve de son projet entrepreneurial depuis plus d’une décennie.
Après des études à l’Université Laval en arts et sciences de l’animation, il s’investit dans le milieu, notamment auprès d’une boîte de production montréalaise, où il «roule sa bosse» pendant deux ans.
Mais son intérêt pour l’entrepreneuriat ne le quitte pas. Au contraire, son envie de se lancer à son compte et de produire ses propres projets se transforme tranquillement en besoin.
En 2023, il fait le grand saut et décide de s’accoler le titre d’entrepreneur une bonne fois pour toutes. «Je devais faire mes propres affaires.»
«Je n’étais plus capable d’avoir mon rêve en moi et de le laisser dormir […] J’étais tanné de penser que j’avais besoin des autres. […] Les autres réussissent et sont capables. Pourquoi moi je ne le serais pas?»
—  Neegan Sioui Trudel, producteur
Dès lors, les projets de toutes sortes s’enchaînent et Oraquan Médias collabore notamment avec le Réseau de télévision des peuples autochtones (APTN), le musée des Abénakis, le musée huron-wendat de Wendake et l’école Wahta.
La tête pleine d’idées, Neegan Sioui Trudel termine maintenant la production de sa toute première série télévisuelle. Le jeune entrepreneur, particulièrement interpellé par les propositions qui font écho à son identité autochtone, espère contribuer à exposer «le monde à travers une loupe différente».
«C’est une façon de porter notre voix, souffle-t-il.
Mentorer et être mentoré
En plus des projets créatifs qui s’accumulent, Neegan Sioui Trudel se donne pour mission de partager son expertise avec la relève autochtone. Un devoir qui revient de facto aux boîtes de production autochtones, estime-t-il.
«Si tu prends vraiment ton rôle au sérieux, avoir une boîte de production autochtone, ça vient avec la mission de former la relève […] Tu n’as pas le choix sinon pourquoi tu fais ça?», questionne l’entrepreneur.
«Au Québec, il n’y a presque pas d’artisans formés en cinéma et en télévision. Il n’y en a pas beaucoup ou alors ils sont déjà bien installés dans d’autres boîtes [de production]. Il faut former la relève.»
Neegan Sioui Trudel prend donc sous son aile certains artistes émergents, qui deviendront, il l’espère, parties prenantes de l’industrie à leur tour. «Ça fait partie de la réalité qu’on a choisie et, un jour, ça va payer», souhaite-t-il.
Quoi qu’il s’ajoute à tous les défis qu’impliquent les premières années d’une jeune compagnie, le rôle de conseiller comble l’entrepreneur. Lui-même accompagné par des mentors, Neegan Sioui Trudel témoigne de l’importance de s’entourer d’un «réseau de gens chevronnés».
«Depuis des décennies, les réalisateurs le disent. Si tu veux apprendre à faire des films, tu dois faire des films. La façon d’apprendre le métier, c’est d’être dans des boîtes de production. C’est un milieu où tu apprends sur le terrain.»
«Tout le monde se mentore en même temps», plaisante le producteur.
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