Une puissante bombe anti-bunker américaine, la seule à même de détruire les installations nucléaires iraniennes profondément enfouies, constitue l’arme stratégique de choix pour Donald Trump s’il décidait d’engager les États-Unis dans le conflit aux côtés d’Israël. La GBU-57, une ogive de plus de 13 tonnes, capable de s’enfoncer à des dizaines de mètres de profondeur avant d’exploser, manque à Israël pour achever son but de guerre affiché : empêcher la fabrication d’une bombe atomique par Téhéran.
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Depuis les premiers bombardements dans la nuit du 12 au 13 juin, l’armée israélienne a réussi à décimer le commandement militaire iranien et nombre d’installations de surface. « Il reste beaucoup de questions sur l’efficacité des frappes israéliennes contre le cÅ“ur battant du programme nucléaire iranien », résume Behnam Ben Taleblu. Selon l’expert de la Foundation for Defense of Democracies, un centre de recherche américain plutôt néoconservateur, « tous les yeux se tournent vers Fordo ». Cette usine d’enrichissement d’uranium, située au sud de Téhéran, n’a subi « aucun dommage », d’après l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Car, à l’inverse des sites de Natanz et d’Ispahan, dans le centre de l’Iran, celui de Fordo est caché sous la montagne, à 80 mètres de profondeur, hors de portée des bombes israéliennes.
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« Seuls les États-Unis ont la capacité conventionnelle » – la GBU-57 – de détruire un tel site, affirme Mark Schwartz, général américain qui a servi au Moyen-Orient, désormais expert au sein du groupe de réflexion Rand Corporation. Cette bombe américaine est unique, car elle peut s’enfoncer très profondément dans la roche et le béton. La GBU-57 « a été conçue pour pénétrer jusqu’à 200 pieds (61 mètres) sous terre avant d’exploser », indique l’armée américaine. Contrairement à nombre de missiles ou bombes qui font détoner leur charge au moment de l’impact, ces ogives anti-bunker s’enfoncent d’abord dans le sol pour exploser uniquement une fois l’installation souterraine atteinte.
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Bombe produite par Boeing
Ces armes comportent « une gaine très épaisse d’acier renforcé » qui les aide « à traverser les couches de roche », explique Masao Dahlgren, spécialiste de l’armement au centre de recherche CSIS de Washington. Son efficacité réside aussi dans son détonateur, qui ne s’active pas au moment de l’impact mais « détecte » les « cavités » pour « se déclencher quand (la bombe) entre dans le bunker », détaille Masao Dahlgren. La conception de cette bombe a été lancée au début des années 2000.
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Produite par Boeing, elle est embarquée sous les ailes des bombardiers stratégiques B-2, dont plusieurs appareils stationnent sur la base américaine de Diego Garcia. Mais Washington n’a jamais livré à ses alliés cette arme, dite « bunker buster ». Avec leur long rayon d’action, des B-2 qui décollent des États-Unis « sont capables de voler jusqu’au Moyen-Orient pour procéder à des bombardements, ça a déjà été fait », précise Masao Dahlgren du CSIS.
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Si la décision est prise de les utiliser, « ils ne vont pas juste en larguer une seule (bombe) et puis « terminé », ils en utiliseraient plusieurs pour s’assurer d’une probabilité de succès de 100% », relève Mark Schwartz. Et la supériorité aérienne acquise par Israël en Iran « réduit les risques » qui seraient encourus par les bombardiers B-2.
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Une telle intervention américaine « serait accompagnée d’un grand coût politique pour l’Amérique », selon l’expert de la Foundation for Defense of Democracies. « Il ne s’agit pas de la seule solution » pour s’en prendre au programme nucléaire iranien de manière durable, en dehors d’une solution diplomatique. À défaut de cette bombe anti-bunker américaine, les Israéliens pourraient attaquer des complexes souterrains comme Fordo en « essayant de frapper les entrées, de faire s’effondrer ce qu’ils peuvent, de couper l’électricité », souligne Behnam Ben Taleblu, ce qui semble avoir été fait à Natanz.
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