Il faut avouer qu’on ne s’attendait pas à voir Dean DeBlois aux commandes d’une version en prises de vue réelles de son film d’animation de 2010. Il y a cinq ans, lors d’une classe de maître dans le cadre du Festival international du film d’animation d’Annecy, le réalisateur avait mentionné qu’il trouvait les studios «paresseux» de refaire des œuvres qui ont eu du succès plutôt que d’investir dans de nouvelles idées.
Quand un producteur lui a fait savoir que le studio Universal Pictures comptait offrir le traitement «en vrai» au film qu’il a coréalisé avec Chris Sanders en 2010, Dean DeBlois s’est porté volontaire pour le tourner plutôt que de le voir se retrouver entre d’autres mains.
Il tenait à protéger son récit initiatique qui met en vedette un adolescent viking qui tisse un lien avec un dragon, alors que son peuple les combat depuis des générations.
«J’ai d’abord appelé le compositeur [de la trilogie Dragons, qui est également de retour] John Powell pour lui demander de me convaincre d’abandonner le projet s’il trouvait que c’était une mauvaise idée, indique Dean DeBlois.
«Il m’a dit que si on le faisait avec amour et respect pour les adeptes, cela pourrait s’apparenter à un câlin de nostalgie qui ouvre aussi ses bras à un nouveau public.»
— Le réalisateur Dean DeBlois
Quelques ajouts
Pour le cinéaste de 55 ans, c’était aussi l’occasion d’améliorer certains éléments du scénario. L’original a été réalisé en 15 mois, un délai relativement court pour un film d’animation. Ainsi, certaines idées ont été laissées de côté.
Bande-annonce du film «Dragons»
(Universal)
«J’ai toujours trouvé que le personnage d’Astrid n’était pas assez à l’écran. Dans la nouvelle version, on comprend mieux ce qu’elle désire et ce qu’elle sacrifie lorsqu’elle se joint à Hiccup», explique Dean DeBlois.
Nico Parker, fille du cinéaste Ol Parker et de l’actrice Thandiwe Newton, vue dans le déchirant premier épisode de The Last of Us, incarne la combative Viking.
Mason Thames (Le téléphone noir) se glisse dans la peau du maladroit Hiccup (Harold, en français), tandis que Gerard Butler interprète de nouveau son père, Stoïck, cette fois en chair, en os et surtout en muscles.
«La présence de Gerard, portant un costume de plus de 100 lb, a été bénéfique pour la performance de tous les acteurs, souligne Dean DeBlois. Ses expressions, ses mouvements, sa stature, en plus de sa voix, communiquent une énergie telle que ses partenaires de jeu, en particulier Mason, ont livré une prestation encore plus authentique et nuancée.»
Une scène en début de parcours permet aussi de mieux comprendre le rôle du chef de l’île Berk. Les Vikings qui y habitent sont en fait issus de différents lieux et sont réunis par leur combat commun contre les dragons.
«On approfondit la mythologie en expliquant que le succès de cette tribu de guerriers repose sur les épaules de Stoïck», précise le réalisateur et scénariste.
Récit thérapeutique
Au cœur de l’histoire demeure la relation père-fils et la dualité entre la tradition et le changement. Pour Dean DeBlois, ces composantes portent une signification particulière.
«Le tiraillement par rapport aux attentes d’un père et les désirs de son fils est familier pour bien des parents et des enfants, estime le cinéaste. Pour moi, cette histoire est assez cathartique.»
«Il y avait des tensions entre mon père et moi, mais nous n’avons pas eu le temps de les régler puisqu’il est mort quand j’avais 19 ans. De voir Stoïck dire à son fils qu’il est fier de lui est thérapeutique pour moi.»
— Le réalisateur Dean DeBlois
Aussi émouvant, mais moins tragique est le fait de constater à quel point la trilogie animée que le Québécois a réalisée est chère à tant de gens. «Mason Thames m’a dit qu’il s’est déguisé en Hiccup à l’Halloween et que le personnage était un héros pour lui, car il se sentait aussi à l’écart quand il était plus jeune, indique Dean DeBlois.
«Pour moi, la trilogie initiale de Star Wars est l’œuvre qui a eu le plus grand impact dans ma jeunesse. Au fil des années, plusieurs jeunes m’ont dit que la trilogie Dragons est la plus importante pour eux. Ça me renverse! C’est aussi pour ça qu’on a tant de pression pour ne pas rater notre coup avec la nouvelle version», conclut Dean DeBlois un sourire dans la voix.
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