2:00 am - 21 octobre, 2025

«La fraude et la criminalité financière évoluent rapidement et notre réponse à nous doit être ciblée et décisive», a martelé lundi le ministre des Finances, François-Philippe Champagne, dans un édifice de la colline Parlementaire où il avait convié les médias.

À ses côtés, la secrétaire d’État aux Aînés, Stephanie McLean, a insisté sur la tendance des fraudeurs à s’en prendre aux personnes âgées. De nombreux cas de ce qui est communément appelé des «fraudes de types grands-parents» font les manchettes depuis au moins un an.

Les libéraux de M. Carney proposent de modifier la Loi sur les banques pour forcer les institutions financières à rendre des comptes sur les mesures qu’elles prennent pour détecter et prévenir la fraude. On souhaite aussi que les titulaires de comptes aient plus de marge de manœuvre pour se protéger, comme en pouvant eux-mêmes limiter l’ampleur de transactions permises.

M. Champagne a affirmé que les banques en font déjà beaucoup contre la fraude, mais que des obligations ainsi que des mesures «concrètes» et «ciblées» ont besoin d’être «codifiées».

Il a noté la présence, à ses côtés, du président de l’Association des banquiers canadiens, Anthony Ostler, de même qu’un représentant de la Banque Nationale du Canada.

L’organisation Option consommateurs a tenu à préciser, dans un communiqué, que l’approche d’Ottawa «ne doit pas être complaisante envers les banques».

Le groupe demande à ce que des mesures législatives soient prises pour obliger les banques à rembourser leurs clients quand ils sont victimes de fraude. Les modifications promises à la Loi sur les banques n’ont pas été détaillées suffisamment par le ministère des Finances pour savoir si elles iraient aussi loin que ce qu’Option consommateurs souhaite.

«Les fraudeurs multiplient les stratagèmes sophistiqués […] qui leur permettent de percer les mesures de sécurité des banques. Les banques doivent porter une plus grande responsabilité dans ces fraudes», a déclaré un analyste et avocat pour l’organisation, Alexandre Plourde.

Le porte-parole bloquiste en matière de finances, Jean-Denis Garon, a aussi mis en garde contre un possible laxisme envers les institutions financières. «Nous demandons aussi au gouvernement de responsabiliser les banques pour qu’elles aussi mettent l’épaule à la roue pour réellement bloquer la voie aux fraudeurs», a-t-il soutenu dans une déclaration écrite.

Quoi qu’il en soit, M. Ostler a assuré, aussi par écrit, que les banques canadiennes sont pleinement investies dans la lutte à la fraude. «Grâce à la Coalition canadienne antifraude, nous entreprenons des initiatives intersectorielles destinées à sensibiliser aux activités frauduleuses, à raffermir la prévention de la fraude et à soutenir les personnes vulnérables, dont les aînés», a-t-il soutenu.

Outre des changements législatifs, les libéraux misent sur un code de conduite auquel les banques pourraient adhérer sur une base volontaire. Celui-ci porterait sur la maltraitance financière, qu’Ottawa définit comme une forme de violence survenant «lorsqu’une personne contrôle l’accès à l’argent, au crédit ou aux ressources financières d’une autre personne, ce qui fait que cette dernière se trouve maintenue dans une situation de dépendance et de peur».

M. Champagne a aussi annoncé la création souhaitée d’une agence des crimes financiers. À cette fin, le ministre a promis le dépôt d’un projet de loi d’ici au printemps, mais n’a pas chiffré le coût de création et de fonctionnement de l’agence.

Les libéraux, lorsqu’ils étaient sous la gouverne de l’ancien premier ministre Justin Trudeau, promettaient déjà pareille mesure. L’engagement se retrouvait dans leur plateforme électorale de 2021.

Questionné à savoir pourquoi choisir la création d’une nouvelle entité plutôt que de confier des responsabilités supplémentaires à des autorités fédérales qui existent déjà, comme le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), le ministre a défendu son approche.

Il a plaidé que «quelque chose de différent» est nécessaire afin d’avoir «des personnes spécialisées» et des pouvoirs d’enquête poussés, citant en exemple une division, aux États-Unis, du FBI, de même qu’une unité similaire au Royaume-Uni.

Le Bloc québécois craint «que le gouvernement s’éparpille à nouveau dans de la nouvelle bureaucratie» en évitant de bâtir sur ce qui existe déjà, comme le CANAFE, a encore signalé Jean-Denis Garon.

Les conservateurs vont plus loin en tranchant qu’il est clair et net qu’on a affaire à un cas de bureaucratie. 

M. Champagne a réfuté cette possibilité lorsqu’il a été interpellé par une journaliste sur ce front.

«Au contraire, on va rassembler les forces fortes parce que […] combattre les crimes financiers aujourd’hui, ça prend des techniques, de l’expertise, des processus qui sont différents. Ce n’est plus comme à l’époque», a-t-il dit en évoquant le recours répandu par des fraudeurs aux réseaux sociaux.

Malgré leurs critiques, les conservateurs voient l’annonce du ministre Champagne comme un pas dans la bonne direction.

«Certaines des mesures annoncées aujourd’hui ont été volées dans la dernière plateforme électorale conservatrice, comme d’exiger que les statistiques sur la fraude et les arnaques soient rapportées. C’est un début, mais ça ne va pas assez loin», a tranché le porte-parole de l’opposition officielle en matière de finances, Jasraj Singh Hallan.

Lors de la récente campagne électorale fédérale, les troupes de Pierre Poilievre avaient proposé de veiller à ce que les banques et les entreprises de téléphonie mobile canadiennes détectent mieux les arnaques, alertent les victimes potentielles et bloquent les fraudes présumées en temps réel.

La formation politique avait également promis d’augmenter les amendes et les peines de prison pour les criminels qui escroquent les Canadiens vulnérables.

Le Centre antifraude du Canada a recensé plus de 30 types de fraudes ciblant les consommateurs et les entreprises canadiennes.

Le plus récent rapport statistique annuel du Centre indique que les personnes de moins de 50 ans sont plus susceptibles d’être victimes de fraude, mais que celles de plus de 50 ans ont perdu plus d’argent en moyenne pour chaque cas.

Le rapport pour 2024 ajoute que le montant total perdu par les personnes de 60 ans et plus représentait environ 40 % des pertes totales déclarées au Centre.

– Avec des informations de Jim Bronskill

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Le Soleil est un quotidien francophone de Québec. Fondé le 28 décembre 1896, il est publié en format compact depuis avril 2006.

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